Disparues. Je les avais apposées hier après-midi, mes affiches pour l’expo d’estampes numériques que nous organisons. Les rutilants burgers que j’avais poliment placardés à l’arrêt de bus de mon quartier ont été engloutis par les sempiternels DJs des mornes boîtes de nuit beaufs. DJ Santander El Niño Jackson (prénom « peut-être fictif ») ne se contente pas de bouffer impunément mon burger publicitaire, mais il étale sa gueule entourée de seins galbés sur l’entièreté du panneau public pour annoncer une soirée Ladies’ Big F*** Boobs Shit House Electro Fun Ray Ban Party. Ainsi, même le concert annuel de la fanfare de Cortaillod-sur-Sel-de-lit-des-Vaches-Sud passe inaperçu, et ça! c’est dégueulasse!

Pour communiquer un événement, il existe plusieurs possibilités. La première consiste à engager une agence de comm’ agressive qui promet un job fun à de jeunes étudiants qui sont contraints d’interpeller les passants en s’apitoyant sur le sort de pauvres enfants du tiers-monde, qui n’ont ni toit, ni eau, ni pas grand’chose en fait. En signant un formulaire et en versant l’équivalent d’un café par mois, vous permettez à ces enfants du tiers-monde de manger pendant une année à leur faim, à condition que les provisions livrées par avion tombent dans la bonne zone, pas dans celle qui est peut-être tenue par un groupe d’hommes qui ont reçu des fusils trois mois plus tôt (1). L’agence de comm’ jeune et dynamique appuie sa campagne avec des affiches format mondial aux messages provocateurs ou culpabilisants que tout le monde aura l’occasion de lire une vingtaine de fois dans la rue. C’est très cher, mais le message passe plus ou moins bien et il y a au moins un retour sur investissement.

La deuxième possibilité consiste à engager les types qui posent les affiches pour la discothèque qui programme DJ Santander El Niño Jackson. C’est moins cher, par contre, vous risquez sérieusement de voir un troupeau de voitures tunées scintillantes et bruyantes – accompagnées de leurs rejetons de quads – rameuter à votre exposition en demandant de mettre un disque de David Luganighetta.

Il reste une dernière solution, moins onéreuse, mais qui nécessite un peu plus de temps : ouvrez un blog environ deux mois avant votre manifestation, écrivez cinq ou six articles pour faire croire qu’il s’y passe quelque chose (vous pouvez vous contenter de publier des dessins, des photos ou des recettes de cuisine), diffusez le tout agressivement sur les réseaux sociaux. Enfin, répétez votre message en promettant des trucs gratuits – un apéritif bien arrosé, par exemple – et surtout, organisez une after avec DJ Santander El Niño Jackson aux platines. Vous devriez voir poindre un public assez hétérogène, ce qui est plutôt sympathique.

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L’exposition Mondialisation est ouverte jusqu’au 6 décembre 2014, plus d’informations sur ce lien. Vous y découvrirez l’appétissant Burger – dont je parle dans ce billet – de l’artiste suédois Erik Svetoft.


(1) Je ne comprends toujours pas comment le fait de donner du café garantit à ces enfants de ne plus avoir faim.