Ce n’est pas une conversation de bistrot qui m’a inspiré ce billet, mais plutôt une ritournelle des salons de thé. En effet, je ne sais pas comment ça s’est passé dans le reste du monde, mais en Suisse, l’été était franchement pourri (d’un point de vue météorologique). Du coup, le temps froid et maussade a eu passablement de répercussions sur l’humeur des gens, tant sur les réseaux sociaux que sur le pas de la porte en papotant avec le voisinage.
Alors bien sûr, au bout de deux mois, le sujet se répète ; il faut bien trouver un moyen de rendre ça plus croustillant. Certains se sont ainsi plu à agrémenter leur discours de données statistiques telles que « ça fait plus d’un siècle qu’on n’a pas eu d’été aussi froid et pluvieux », ou encore de s’apitoyer sur le sort des marchands de glaces qui « doivent tirer la gueule cet été ». Et qu’on ne me méprenne pas, j’ai entonné le même refrain râlant – y allant de mon couplet complaisant – avec mon voisinage et mes amis pendant deux mois. C’était un peu ça, le tube de l’été : une petite dose de lamentations quotidiennes à partager entre amis. Puis un beau jour, j’ai entendu quelqu’un qui en avait ras-le-bol. Quelqu’un qui s’est dit « y en a marre de ces grincheux! » Sur la partition estivale, ce quelqu’un a amené le « bridge » (le pont) après le deuxième refrain en comparant – avec la finesse d’un batteur de heavy metal rotant sa bière au petit déjeuner – la situation météorologique en Suisse aux… situations de guerres dans le monde.
Effectivement, comment ose-t-on se plaindre du temps qu’il fait en Suisse alors que pendant ce temps, des gens meurent sous une pluie de bombes à Gaza ou en Ukraine? A-t-on vraiment le droit de gémir? De fredonner cet air plaintif alors que des gens vivent une situation bien pire? « Chez nous, tout va bien! Cet été est parfait, je ne vois aucun problème! » clama cet individu d’un air inquiétant, oscillant entre crise de nerfs borderline et illumination divine.
Si j’ai bien compris, notre bonheur dépend en fait des situations plus dramatiques des autres, de leur malheur en somme. Donc si vous cherchez à vous lamenter, ce sera difficile, car il y a encore pas mal de monde qui endure des problèmes autrement plus lourds : fièvre ébola, conflits géopolitiques, torture, éruptions volcaniques accompagnées d’attaques de dinosaures… On ne sait plus sur quel pied danser, tant les déboires d’autrui abreuvent notre réservoir de bonheur.
Bah… heureusement qu’en septembre il a fait beau. On a enfin pu changer de disque.
Gros con
Hé Oncle Phil, t’as un doctorat en philosophie de comptoir ?!
chezonclephil
Bonjour. C’est bien, je vois que j’en inspire d’autres! Bonne journée