– Chéri, tu m’aimes?
– Bien sûr mon amour!
– Alors partage si tu m’aimes!
– Euh… je…
– J’ai dit: partage si tu m’aimes!
Ce genre de conversation peut vous paraître un peu surréaliste. Pourtant, si vous passez votre temps à faire défiler des « contenus » sur les réseaux sociaux, vous avalez quotidiennement des inepties de ce genre. Le principe est simple: il consiste à encourager le lecteur avachi devant son smartphone à tapoter de son pouce mollachon sur l’onglet « j’aime » de Facebook ou mieux encore, obtenir un « partage » de publication dans le but de gagner en visibilité. Pour que ça marche, il faut une image racoleuse, une courte vidéo, un slogan choc ou une citation si possible d’une figure historique comme Albert Einstein (ou pas, de toute façon personne ne vérifiera les sources, mais il convient d’ajouter un nom très célèbre). La capture d’écran ci-dessous illustre bien ce principe de conditionnalité, de façon humoristique pour le coup.
Ce qui est fascinant, c’est qu’énormément de monde s’est approprié ce type de discours, à des fins différentes, mais avec une forme relativement similaire. Logiquement, les plus friands dans ce genre d’histoire, ce sont les publicitaires et autres communicants. L’image ci-dessous fait figure d’exemple où un « j’aime », un « commentaire » et un « partage » de la publication peuvent rapporter… une RANGE ROVER avec un noeud rose! Pour savoir si on a gagné ce magnifique 4×4, il faut encore cliquer sur « j’aime la page » pour s’assurer de « rester informé ».
Certains vont plus loin en demandant d’identifier un « ami », histoire que cet « ami » reçoive une notification qui l’invite à suivre la même procédure ou à ignorer cette requête, tout comme les 54 autres requêtes qui vous permettraient peut-être de gagner des Ray-Ban, des tickets d’entrée à la foire aux asperges de Courrendlin ou une nuit d’hôtel à Kandersteg (petit déjeuner non inclus). Etant donné que je tombe constamment sur ce type de pub, j’imagine que le procédé porte ses fruits d’un point de vue marketing, vu le niveau de visibilité que cela doit rapporter. Cette visibilité est encore augmentée si la publication est « sponsorisée », c’est-à-dire si le publieur paie afin que son message passe même auprès de lecteurs qui ne seraient pas forcément concernés. Alors ça en inspire d’autres qui ont besoin de toucher le « peuple »: les partis politiques.
Pour lancer une campagne politique dans le but juguler la hausse des tarifs des assurances maladies en Suisse, le parti socialiste exploite le même filon que les publicitaires. Il faut croire qu’on ne se contente désormais plus d’un « votez », mais que les « aimez » et « partagez » ont aussi intégré le vocabulaire de base des politiciens. Comme quoi, politique et marketing partagent passablement d’éléments en commun pour convaincre les électeurs-consommateurs.
Alors peut-être bien que nos relations sentimentales s’en verront tout autant conditionnées par des « j’aime » ou des « partage ». Peut-être que les générations futures se marieront suite au partage de la vidéo d’un chat dans une pastèque, ou peut-être que ces mêmes individus divorceront suite à une publication non partagée. Sur les réseaux sociaux, l’amour et le partage tiennent plus d’un argument de vente que de sentiments sincères. SI TU ES D’ACCORD avec cette phrase, AIME et PARTAGE cette publication auprès de tes AMI-E-S!!! Bon, il n’y a pas de Range Rover à la clé, mais peut-être d’autres vidéos de chats dans des pastèques.
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